Sortie naturaliste : Géologie à la Carrière de Fresville (50) le samedi 13 novembre 2010.

Carrière de Fresville – Manche

Calcaires marneux sinémuriens (Lias) exploités jusque vers 1980.
Très riches en fossiles (gryphées, spirifer…)
HISTORIQUE
Créé en 1994 par sa présidente fondatrice Madame Jacqueline Legal, le Club de Géologie du Cotentin Fresville-Fossiles regroupe une trentaine de membres actifs originaires de tout le département de la Manche.Cette association loi 1901 (JO du 13 mars 1994) a pour buts de développer la connaissance des Sciences de la Terre et de l’Archéologie, de la partager entre ses membres et de la transmettre au public intéressé. Elle est affiliée à la Fédération Française des Amateurs de Minéralogie et Paléontologie, elle a reçu l’agrément du Ministère de l’Environnement dont elle est partenaire, elle collabore avec le BRGM et la Société Géologique de France, et est membre de l’Association Patrimoine Géologique Normand

Le Club de géologie possède des locaux à l’intérieur de l’ancienne carrière de Fresville, devenue « Géosite de Fresville ». Ils sont constitués de deux bâtiments, l’un destiné aux réunions des membres de l’association et à l’accueil du public, le second aménagé en lieu d’exposition permanent où sont présentés les produits des recherches et particulièrement les fossiles et minéraux de Fresville.

La carrière est située entre Fresville et Le Ham, au lieu-dit Le Goulet. Elle a été ouverte en 1906 pour approvisionner la cimenterie du Ham construite en 1912 par la Société des ciments Portland et Chaux du Cotentin. Elle est ensuite exploitée par les Ciments Français, puis par l’entreprise Calcia jusqu’en 1984. Les matériaux extraits étaient d’abord transportés par des charrettes à chevaux, puis par un petit train et ses wagonnets jusqu’en 1982, et enfin par camions jusqu’à la fermeture définitive en 1986.
Une décharge d’ordures ménagères pour le Nord-Cotentin était en projet en 1988. Les Fresvillais ont exprimé une ferme opposition qui a eu des échos nationaux et ont obtenu gain de cause ; la carrière d’une superficie de 20 ha est aujourd’hui aménagée avec un plan d’eau pour des activités de pêche et le Géosite.

La configuration du site est la suivante. Deux zones d’extraction sont séparées par la passerelle du chemin rural : la très ancienne carrière (B) est inondée et végétalisée ; la carrière principale d’une superficie d’une vingtaine d’hectares est presque entièrement inondée (C) avec au sud-est une petite excavation (D) dans le gradin supérieur.
La butte entaillée culmine à + 35 m NGF.
Le front de taille se décompose en deux gradins (a et b) séparés par un palier (d) :

– le gradin supérieur (a) mesure de 1 à 7 m de hauteur au sud jusqu’à 13 m à l’est ;
– le gradin inférieur (b) mesure 7 m de hauteur au nord-ouest jusqu’à 10 m à l’est ;
– le plancher (c), aujourd’hui noyé, est à la cote + 1 m NGF ;
– deux tranchées profondes de 4 m sont creusées dans le plancher.

Un parcours pédagogique a été aménagé autour de l’étang artificiel. Il est constitué de panneaux explicatifs permettant de comprendre la géologie et la paléontologie du site et de la région.

Le front de taille de la carrière est constitué d’une succession alternée de bancs calcaires argileux et de marnes d’âge Sinémurien (190/195 millions d’années environ) appartenant au Jurassique inférieur ou Lias ; la différence entre ces deux roches tient dans la teneur en carbonate de calcium (CaCO3) de plus ou moins 35 %. Le calcaire argileux est bio micritique, c’est-à-dire constitué d’un assemblage de débris d’organismes liés par un ciment naturel microcristallin. La teneur en carbonate de calcium ne dépasse pas 40 %.
Le premier front, de 6 à 8 m, est gris bleuté ; le deuxième, de 10 à 12 m, est jaunâtre car la roche est plus oxydée, mais la composition entre ces deux parties varie peu. L’ensemble de ces couches est très fossilifère : Gryphées, ammonites [Coroniceras (Arietites), Arnioceras], nautiles, autres bivalves, brachiopodes, gastéropodes, bois, terriers, crustacés, restes de vertébrés, etc. Les minéraux ne sont pas rares : pyrite en nodules, calcite en gerbes et en dents de chien.
La structure est typiquement monoclinale et de faible pente, de 3 à 5° vers le sud-sud-est. L’inclinaison des couches est due au fait qu’à cette époque géologique un contexte de subsidence prédominait, le Bassin parisien s’enfonçant progressivement.
Plusieurs failles sont visibles dans la carrière. Elles sont les témoins d’une phase d’extension de la lithosphère (failles simples) au Jurassique moyen et au Jurassique supérieur, puis d’une phase de compression (failles avec décrochement) d’âge alpin (de – 28 à – 5 Ma). Le décalage peut être de quelques dizaines de centimètres à deux mètres. Elles sont soulignées par des recristallisations de calcite ; certains échantillons portent des stries qui témoignent d’un rejeu de faille.

Au niveau de la petite excavation (D), sur le plan, on peut voir le contact Sinémurien-Cénomanien (95 Ma), le Cénomanien faisant partie du Crétacé supérieur.

Les joyeux convives, avec au menu : Tarte aux légumes maison, Travers de porc frites, feuilleté de poire au chocolat…
Présents à midi à Montebourg pour déjeuner à L’Intemporel : Véronique, Maurice, Juliette, Muriel, Françoise, Céline, Loïc, Dominique (Thévenin), Dominique (Dethan).
Christian (Allain) nous rejoint après manger à Fresville.

L’arrivée à la carrière de Fresville sous la pluie qui ne va pas nous quitter de l’après-midi !
Chantez : L’association dans le mauvais temps, qu’elle avait bien du courra…age…
L’association dans le mauvais temps, Tous derrière.ère (bis)
Et lui devant !

Pour commencer présentation à notre (sympathique et compétent) guide Monsieur Duloir, avec petite visite de l’exposition fossile.


Vitrine des fossiles de la carrière, dans le bâtiment d’exposition. Carte détaillée de la géologie du Cotentin.

Exposition d’Ammonites et de Nautiles d’autres provenances.
Puis, l’association emprunte le sentier découverte de 2 kilomètres en boucle fléché et jalonné de stations d’interprétation autour du plan d’eau. Ce plan d’eau attire les oiseaux, et la juxtaposition des milieux secs et humides présente un intérêt pour la flore.

Etablie sur l’ancienne campagne du Goulet, la carrière de Fresville était autrefois un site d’extraction du calcaire qui alimentait l’usine à chaux et à ciment située sur la proche commune du Ham. A la fin de sa période d’activité, elle offrait alors au regard, sur près de 500 mètres de long et 20 mètres de hauteur, deux niveaux de front de taille, l’un de calcaire jaune, l’autre de calcaire bleu. Le 23 avril 1913, la Société anonyme des ciments de Portland et Chaux du Cotentin, fut créée. Elle se substitua probablement à une société antérieure dont elle conserva le siège social à Cherbourg. Son fondateur et directeur général, Léon Gustave Adrien Laloë apportait à la nouvelle société un couple de fours élevés en 1912 sur la commune du Ham.
En 1920, la Société générale des Chaux et Ciments, dont le siège social était à Paris, devient la nouvelle propriétaire de l’usine dite de Fresville-Montebourg. En 1939, la Société des Ciments Français devient propriétaire du binôme Carrière de Fresville/Cimenterie du Ham. Le 30 juin 1984, pour des raisons de rentabilité, la cimenterie du Ham ferme, entrainant l’arrêt de l’exploitation de la carrière de Fresville.
C.P.A. : Ciment de Portland Artificiel Le Français Louis Vicat découvrit en 1817 le principe d’hydraulicité des chaux – concernant la proportion d’argile et la température de cuisson – et publia ses travaux sans prendre de brevet. En 1824, le Britannique Joseph Aspdin déposa un brevet pour la fabrication d’une chaux hydraulique à prise rapide qu’il appella commercialement le ciment Portland, car la couleur de son produit ressemblait aux célèbres pierres des carrières de la péninsule de « Portland » situées en Angleterre (face à la Hague)

Au Lias, les vases carbonatées marines se sont décantées et déposées à l’horizontale sur le fond de la mer jurassique, qui recouvrait alors une partie du Cotentin. Elles se sont lentement transformées en banc de roches dures (calcaires) ou plus tendre (marnes).
Des failles compressives (failles inverses et décrochements) affectent localement les alternances marno-calcaires. Au niveau du plan de faille, les bancs sont brutalement interrompus et des recristallisation de calcite apparaissent.

Sur les bords du plan d’eau : La blackstonie perfoliée (Blackstonia perfoliata (L.) Huds.) – une plante herbacée annuelle de la famille des Gentianacées. Sur les éboulements dus à l’érosion un coprin chevelu (Coprinus comatus), et un peu plus loin de la Piloselle (Hieracium pilosella)
Malgré la pluie, un micro lépidoptère courageux a été aperçu : selon les spécialistes, c’est un ptérophore.

Quel temps!

Suite de la visite : Au Crétacé inférieur, la Basse Normandie est émergée. Puis au Crétacé supérieur (Cénomanien), la mer revient par l’Est et recouvre alors toute la Normandie pendant au moins 20 millions d’années. A Fresville, l’émersion du Crétacé inférieur s’enregistre par la mise en place d’un paléosol formé d’argiles grises et roses renfermant des concrétions calcaires et des fragments charbonneux. Au Crétacé supérieur, le retour de la mer se marque par le dépôt de sables verts (glauconie) riches en fossiles de bivalves (Exogyres) et de foraminifères (Orbitolines). La montée des eaux marines se caractérise ensuite (ferme de Vauville) par le dépôt de calcaire à ammonites déroulées.
Un exemple fréquent d’Exogyre et d’Orbitoline :

Des vers fossilisés et Spiriferina walcotti

L’intérieur d’un Plagiostoma giganteum et Gryphaea arcuata


4 rostres de bélémnite et divers bivalves (Cardinia, Chlamys)

Une dernière station d’interprétation raconte en image la vie d’il y a 200 millions d’années.
Le Jurassique est l’époque géologique de la diversification des invertébrés (oursins, mollusques, brachiopodes), du règne sans partage des reptiles qui dominent la planète sur terre, mer et air, grâce à leur facilité d’adaptation. Ils produisent les plus grands animaux terrestres de tous les temps.
Les ammonites sont apparues depuis le dévonien (310Ma) et sont les lointains cousins des actuels céphalopodes : Nautiles, sèches et calamars. Leur diversité est bien plus importante au Mésozoïque qu’aujourd’hui. Ammonites et Bélemnites ont complètement disparus au Crétacé. Les ammonites étaient probablement carnivores, capturant leurs proies avec leurs tentacules et les broyant dans leurs becs cornés avant de les manger.
Les ammonites vivaient à l’intérieur d’une coquille calcaire souvent enroulée qu’elles fabriquaient pendant leur vie au fur et à mesure de leur croissance. Ces coquilles sont cloisonnées mais seule la dernière loge, la plus grande, sert d’habitation. Les cloisons sont réunies par un tube qui permet à l’animal d’injecter ou de vidanger un liquide pour modifier la flottaison de sa coquille, tels les ballasts d’un sous-marin.
Les fossiles de Fresville : Les fossiles sont des restes organiques (animaux ou végétaux) conservés dans les dépôts sédimentaires. Ils peuvent correspondre aux parties dures de ces organismes (coquille, os, bois) et sont le plus souvent transformés par minéralisation de leurs tissus organiques et squelettes.
Les fossiles ne représentent qu’un échantillon restreint des conditions de vie du passé, car seule une infime partie des organismes vivants est fossilisée.
Exemples: Plagiostoma giganteum, Cardinia listerie, Gryphaea arcuata, Rostre de bélémnite, Mactromya cardioides, Ammonite Arietites.

Merci à Véronique de nous avoir fait connaître ce site et d’avoir organisé cette balade, nous avions peu étudié la géologie jusque là…
Les Curieux promettent aussi de revenir par meilleurs temps pour étudier aussi la faune et la flore, peut-être dans le programme de l’année prochaine.

Et comme en France tout se termine par des chansons et celle-ci correspond bien à notre sortie :
“I’m singin’ in the rain, just singin’ in the rain. What a glorious feeling, I’m happy again. I’m laughin’ at clouds so dark up above. The sun’s in my heart and I’m ready for love. Let the stormy clouds chase, everyone from the place. Come on with the rain, got a smile on my face. I walk down the lane with a happy refrain
I’m singin’, just singin’ in the rain. (Let it rain all day)”
 
 
 

 

 

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